Ancien chasseur, adhérent ANTAM

 Adhérent de l’ANTAM depuis peu, je dois cet honneur et ce plaisir à l’amical appui du Général René Perret et celui de mon beau-frère le Colonel Jean Cazenave.

Jean Cazenave sait depuis longtemps que le pilote de chasse que j’ai été doit beaucoup au transport aérien militaire et plus particulièrement au s/GMMTA d’Indochine en 1954. Je vais donc restituer l’époque et le contexte.

Juillet 1954 Haïphong au Tonkin, neuf années de guerre se terminent dans des conditions douloureuses. Nous rendons aux Vietnamiens les prisonniers que nous détenons (en bonne forme), ils nous rendent les rescapés de leurs camps dans un triste état et c’est un triste spectacle.

Je suis à cette époque un jeune pilote sortant d’école et affecté au groupe de chasse 2/22 Languedoc. Nous venons de défiler pour le 14 juillet (il faut garder la tête haute) mais le moral n’est pas terrible.

Faisant suite aux accords de Genève, la France réembarque son corps expéditionnaire et il ne reste au Tonkin que notre groupe en protection du réembarquement.

Les américains qui nous soutiennent en matériels limitent fortement le réapprovisionnent de nos dotations de peur, peut-être, de voir des incidents se produire. Cela limite nos activités, il faut économiser le potentiel au cas où !!! Nos camarades du transport, eux, en revanche, volent énormément. Il faut entre autre à cette époque évacuer les populations catholiques du Tonkin qui fuient le communisme. Il y a en juillet 1954 quatre groupes de transport en Indochine, l’Anjou qui vient de percevoir les Nord 2501, le Franche Comté, le Béarn et le Sénégal qui sont dotés de C47. Le commandement demande si des pilotes de chasse sont volontaires pour aller voler comme copilotes chez nos amis transporteurs. En ce qui me concerne je n’ai qu’une envie, c’est de voler et, à cette époque, le C47 est déjà un avion mythique.

J’ai donc pu faire deux courts séjours dans le transport, l’un au Sénégal et l’autre au Franche Comté. J’y ai été particulièrement bien accueilli et j’ai eu, de surcroîts, la chance au Sénégal de voler avec un EMA Commandant d’avion, le lieutenant Lales qui m’a beaucoup appris. Avec ce pilote j’ai réalisé, sous son contrôle, ma première variation de QDM sur le terrain de Hué. Pour moi, chasseur, « c’était de l’hébreu ». De nombreuses années plus tard, en 1972, alors à Air Inter, effectuant une variation de QDM sur le terrain de Quimper j’ai repensé à Lales et à Hué !!!

Après mon départ de l’armée de l’air et grâce à une qualif DC3 et un stage IFR délivré par le CEV de Villacoublay, j’ai postulé pour une place de commandant de bord DC3 à Air Algérie. Les éléments décisifs pour mon recrutement ont été mes heures de vols en général bien sûr et ma connaissance du Sahara, mais surtout mon importante activité sur C47 réalisée en Indochine au sein du transport ; Alors merci le  s/GMMTA. La chance d’être embauché directement comme commandant de bord dans une compagnie importante a été déterminante pour ma carrière.

J’ai fait par la suite deux périodes dans les réserves, l’une au Touraine et l’autre à l’Anjou et je n’en garde que de très heureux souvenirs. Je peux dire qu’avec les atterrissages de nuit six balises et les navigations de nuit avec les photos radar, les transporteurs n’ont rien à envier aux chasseurs en ce qui concerne les montés d’adrénaline.

 En résumé, je suis conscient de ce que je dois à l’armée de l’air et de la chance que j’ai eu à cette époque de voler et d’être formé sur les avions du Transport aérien militaire. J’ai ainsi pu débuter dans des conditions exceptionnelles ma vie de pilote de ligne.

Alain RANC,  Lieutenant (H), pilote de ligne retraité